A Maman que j'aime
Parfois je me demande comment je fais pour rester si optimiste, si amoureuse de la vie, si positive dans toute situation, dans toute décision à prendre, comment je peux avoir toujours envie de rire, de m’amuser, de chanter, de raconter et d’imiter. (J’imite assez mal, mais tant pis, j’observe et j’essaie de reproduire). Je ferme la parenthèse, mes improbables dons d’imitation ne sont pas l’objet de ces lignes. Oui, je me demande comment je fais, quelle est cette force qui m’anime car parfois la tristesse me rattrape, m’envahit et me laisse désespérée. Je pleure, je pleure à fendre l’âme, j’ai besoin de pleurer. Et lorsque mes larmes semblent taries, je vais mieux.
Mais il ne faudrait pas croire que tout est aussi simple que cela. Le passé ne s’efface jamais complètement, tout au plus il se dilue dans la vie qui coule, les plaies que l’on croyait bien cicatrisées sont de faibles proies que l’aiguillon du souvenir ne demande qu’à rouvrir. Comme beaucoup d’entre nous, j’ai souffert. Terriblement souffert. Mon mari est décédé voici treize ans, j’ai cru retrouver l’amour quelques années plus tard mais ce dernier compagnon m’a lâchement abandonnée voici bientôt deux ans. Sans un mot, sans explication, comme ça, un passage à l’acte d’une grande violence qui m’a, une fois de plus, mise à terre. Mon père est décédé il y a un an et demi, Maman trois mois et demi.
Et ce soir voit mon enthousiasme enfui, du moins enfoui… je sais que cela ne durera pas mais pour l’heure j’ai beaucoup de difficulté à sourire et être positive. Je reviens de la terre de mon enfance où je suis allée, en compagnie de mon frère, disperser les cendres de ma petite Maman, près de la mare qu’elle aimait tant. Cette terre que mes pas ne fouleront jamais plus. Cette terre où j’ai vécu une enfance sans joie. Cette terre où j’ai été heureuse avec mon mari et mes enfants lorsque nous avons acquis une petite résidence secondaire près de chez mes parents. Cette terre qui m’a vue m’effondrer lorsque mon mari y est décédé par un beau jour d’avril de l’an deux mille. J’ai bien cru que cette terre allait m’engloutir, un gouffre immense s’ouvrait sous mes pas alors que les oiseaux chantaient à tue-tête en ce printemps naissant.
La semaine dernière, j’ai accompagné au restaurant les résidants de la structure où je travaillais. A la fin du repas, les chansons se succèdent, je participe, j’aime chanter. Soudain, la chanson « les roses blanches »… mes yeux s’emplissent de larmes, coulent sur mes joues, j’essaie de ne pas me faire remarquer. Ma copine et collègue Odile arrête le CD avant la fin, elle seule a remarqué. C’était une des chansons préférées de Maman.
Elle aimait aussi beaucoup les marguerites, belles et simples, comme elle.
Je vous promets un texte plus réjouissant la prochaine fois.
Merci ma petite Maman