Jacques monte au ciel, je tombe des nues...
Les lundis de Lakevio
Karin Jurick
Sur ce que vous inspire la toile de Karin Jurick, vous voudrez bien placer les dix mots suivants dans votre texte en les soulignant ou surlignant. pour mieux les repérer.
complémentaire - époustouflant - respirait - baignade - tortionnaire - chanteur - jugera - aberrant - pénitencier - profitera
On était là, tous les deux, mon beau-frère Benoît et moi, assis sur un banc, à l’ombre des grands arbres. Comme deux vieux. Non, pas si vieux que ça mais suffisamment pour avoir tricoté une Histoire… Mailles à l’envers, mailles à l’endroit. Un passé fait de bonheurs et de joies, la vie quoi !
On était bien là, tous les deux, à ne penser à rien, on respirait l’air printanier de ce joli jour d’avril fleuri et prometteur.
Un peu plus loin, un petit poste de radio diffuse les informations… le chanteur Jacques Higelin est mort ! Nos yeux se mouillent, nos voix se brisent, les souvenirs affluent.
Benoît m’écoute raconter… Je viens juste de me retrouver seule. Une période douloureuse malgré un entourage présent, constant, attentionné. Pour tenter de me divertir, un couple d’amis me propose de les accompagner au concert de Jacques Higelin. Je décline l’invitation, arguant du comportement aberrant de cet artiste, complètement ivre sur un plateau de télévision, dans une tenue digne d’un évadé de pénitencier ! Les amis insistent… « Il ne faut pas juger comme ça à l’emporte-pièce, sans savoir… tu verras, il est époustouflant ce mec, tu vas aimer ! Allez viens, on en profitera pour chanter, se défouler, cela te fera un bien énorme, tu oublieras ton chagrin, au moins le temps d’une soirée »…
Nous voilà assis en plein air, devant le kiosque à musique où l’artiste va se produire. Et soudain, il arrive, bondissant, une vraie « bête de scène », j’en suis restée ébahie mais il m’a donné l’impression d’être un tortionnaire envers ses musiciens. Je me suis dit que ces gars-là ne devaient pas être à la noce tous les jours ; une telle fougue ne doit pas être de tout repos… Eh bien non ! Rapidement j’ai ressenti une complicité parfaite entre ces hommes. Jacques Higelin est tour à tour déjanté, explosif, hurlant, bruyant, puis poétique à souhait, cœur d’artichaut, sentimental et pudique. De l’improvisation, des rallonges à n’en plus finir, un orchestre qui a du mal à suivre, toujours la ritournelle complémentaire qui nous fait bondir, crier, chanter, applaudir à tout rompre. Charmée, émerveillée, je ne me suis même pas aperçue qu’il s’était mis à pleuvoir. Comme sortie d’une folle, loufoque et extraordinaire baignade, mes cheveux dégoulinent, mes vêtements collent à ma peau, mais je suis bien, quasiment hypnotisée !