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Pralinensavoie...                 et parfois ailleurs
13 novembre 2017

La petite maison dans la prairie

Les lundis de Lakevio

lakevio

C’est en 1982 que nous avons acheté une maison nichée au cœur de mon Bourbonnais natal. Notre petite maison dans la prairie, comme nous l’appellerons ensuite. Je n’avais pas connu une enfance heureuse et épanouie dans ce paysage presque plat dont la monotonie accentuait encore ma tristesse et mon ennui constants. Mais en faisant la connaissance de celui qui allait devenir mon mari, mon grand amour, j’ai longuement cheminé et pu enfin pardonner à mon père sans pour autant comprendre les raisons profondes de sa méchanceté. Daniel avait réussi à se faire aimer de lui et la vie prenait un heureux tournant. Mais revenons à la petite maison. Lorsqu’un beau jour, Maman nous annonça au téléphone que la propriété jouxtant la leur était à vendre, Daniel, sans même connaître le lieu, dit tout de suite et d’un ton sans réplique « on achète » ! Ainsi fut fait en deux temps trois mouvements. Une jolie maison entourée de quatre mille mètres carrés d’un terrain presqu’en friches. La maison quasi insalubre. Que de boulot à venir mais quel bonheur aussi ! Daniel, sans relâche, s’attaqua à restaurer et agrandir -cela dura plusieurs années- jusqu’à obtenir un nid douillet et confortable. Le pré avait pris allure de belle pelouse agrémentée de multiples arbres et arbustes et de massifs de fleurs multicolores. Les enfants couraient comme des petits fous dans le grand pré, jouaient à cache-cache dans les buissons, faisaient des galipettes jusqu’à la nuit tombante, envoyaient leur cerf-volant si haut dans le ciel qu’on ne voyait plus qu’un petit point noir balloté dans le vent chaud, faisaient du vélo, grimpaient aux arbres... L’été, le tuyau d’arrosage servait de douche, une douche tiède et délicieuse sous laquelle les enfants poussaient des cris stridents en réclamant encore et encore le jet bienfaisant. La douche rustique durait alors bien au-delà d’une simple toilette et je terminais aussi trempée que mes insatiables chérubins. Inlassablement je jouais avec la tondeuse, le rotofil, taillais les haies, désherbais les massifs de fleurs que Maman nous avait données. L’été était l’occasion de réunir famille et amis, autour de la grande table en bois sous l’immense sapin de la cour. J’adorais préparer des repas pour mes bien aimés, plus on était nombreux plus j’étais heureuse. Tôt le matin, après l’arrosage quotidien, mon panier sur le porte-bagage du vélo, je filais dans le jardin de mes parents cueillir les bons légumes dont je régalais mes invités. J’étais affairée comme une abeille, j’aimais que ma maison soit accueillante et que rien ne manque au confort de chacun. L’après-midi c’était farniente puis confitures ou encore conserve de légumes. Et quand le soir tombait, nous apportant un peu de fraîcheur, nous contemplions en silence la voie lactée, comme envoûtés, jusqu’à une heure avancée de la nuit.

****

Hélas… En cette belle journée d’avril 2000 où les oiseaux du printemps chantent à tue-tête, nous avions prévu de fêter mon 48ème anniversaire. Brutalement Daniel s’écroule, mort, dans son petit paradis comme il aimait à le dire. Le bonheur vole en millions d’éclats de verre lacérant mon corps tout entier, me plongeant dans un incommensurable gouffre de détresse duquel il me fallut deux longues années à émerger. A tout petits pas, cahin-caha. Soutenue par mes enfants et mes amis, présents, chaleureux, affectueux, attentionnés, disponibles. J’ai quelque peu transformé ma maison savoyarde. C’est là que j’ai retrouvé goût à la vie en contemplant le flamboiement du soleil couchant sur la montagne dans le calme des soirs d’été, en caressant le manteau de neige dans le silence des hivers. Avec des yeux neufs et des gestes inventés…  J’ai tenté de garder ma jolie petite maison bourbonnaise, je passais toutes mes vacances à travailler à l’entretien de ce paradis perdu. Jusqu’au jour où, épuisée et consciente que je ne retrouverai jamais le bonheur sur cette terre,  j’ai dû me résoudre à vendre. C’était le 14 février… je m’en souviens comme si c’était hier. Le notaire lisait d’une voix monocorde les articles du code civil, les origines de propriété, les plans d’occupation des sols, les servitudes… j’entendais sans écouter. J’étais assise entre les deux petits amoureux qui achetaient ma maison. Ils se faisaient un beau cadeau de saint Valentin, leurs yeux brillaient… les miens aussi…

 

 

 

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Commentaires
M
Coucou Praline il y a si longtemps que je n’etais Pas venue sur mes blogs amis. Je savais très peu de chose de toi, j’ai été très touchée. Je n’ose jamais poser de questions j’ai toujours peur d’etre Indiscrète, mais à plusieurs reprises j’avais noté tes instants de tristesse, moi même ayant tellement souffert je comprends. En ce moment je ne dis rien mais je n’ai pas trop le moral face à ces fêtes Nous partons demain après midi pour Pralo. Si tu as des pneus neige tu devrais monter je t’indiquerai le chemin. Nous restons jusqu’au 27 janvier ensuite tout le mois de février nous y montons chaque fin de semaine pour laisser l’appart a des amis ou des échanges Alors bonne fête à toi et ta fille pour le 25. Nous rentrerons définitivement vers le 10 mars. Bises
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E
Bonsoir Praline et merci beaucoup pour tous tes mots de soutien après le décès de mon mari il y aura 15 jours demain. J'espère que ton texte n'a pas été écrit à cause de ce que je viens de vivre. Peut être que la douleur de la perte de ton cher mari s'est ravivée quand j'ai annoncé la nouvelle sur mon profil FB ? En tout cas, tu as fait du chemin depuis 17 ans, entourée de l'affection de tes enfants, de tes amis et de ton entourage plus large. Je te fais de gros bisous. Bon week end.
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D
Merci Praline. Je reviendrai souvent alors. Sinon, oui, je suis assez nouvelle blogueuse je m'exerce un peu via "deshirondellesetdespapillons" mon blog perso où je parle beaucoup de mes montagnes d'Auvergne( et de ses vaches) mais pas que. J'exerce aussi un peu chez July (d'une extimité à l'autre). En tout cas, c'est un plaisir de te lire ici chez toi et ce sera aussi un plaisir de t'accueillir chez moi et chez nous. Belle journée à toi.
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D
J'ai été très émue de lire ton texte. J'ai d'abord cru à une histoire écrite pour l'atelier et puis en relisant et en lisant les coms, j'ai compris, bien sûr. La vie a son lot de mauvais coup pour chacun mais on est seul quand on les prend. Amitiés. J'ai été voir un peu ton blog du coup, j'aime bien ce que tu fais et ce que tu dis aussi. Si tu me le permets je reviendrais échanger ici.
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C
Merci beaucoup de votre si gentille réponse. Je me suis mal exprimée en utilisant le verbe se raccrocher alors que c'est évoquer que je cherchais, merci de l'avoir trouvé. Je suis parfois triste de ne pas avoir vécu de manière consciente en décidant de ce que je voulais, sans m'en remettre aux autres pour me donner une existence. J'ai beaucoup subi et trop peu agi.<br /> <br /> Oui, c'est important que ma vie d'aujourd'hui soit belle, le bonheur c'est maintenant, l'instant présent et les projets aussi. <br /> <br /> C'est compliqué parfois, il m'arrive d'avoir du mal à me comprendre. Ce qui est sûr : j'apprécie beaucoup plus la vie qu'il y a une 10aine d'années. <br /> <br /> Je vous embrasse aussi.
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