Veille de départ
Ce serait trop beau si la vie n'était faite que de douceur et de plaisir, de loisirs, de vacances, de longs week-end au soleil à ne rien faire ou à crapahuter par monts et par vaux. Dans ce registre-là, je me sens plutôt gâtée, j'aime la vie que je mène, je n'en perds pas une miette dès que mon travail m'en laisse le temps. Mais il ne faut pas croire que tout va comme sur des roulettes à longueur de temps, je connais bien des angoisses et des peurs, je me réveille parfois la nuit en pleurant lorsque surgit dans mes pensées la fin de vie de mes parents. Demain je prendrai la route pour aller les visiter. J'en ai déjà le ventre noué et une douloureuse angoisse m'étreint. J'appréhende toujours plus mon arrivée chez eux. Mon père au téléphone a une voix presque inaudible, il passe beaucoup de temps alité, je le trouve chaque fois plus affaibli. Quant à ma petite Maman, c'est un immense chagrin que d'assister à sa déchéance, cela me broie le coeur, me donne une nausée immonde et me plonge dans un désespoir difficilement maîtrisable. Elle n'est plus elle-même... où est ma Maman rigolote, intelligente, cultivée, vive et toujours prête à donner, à faire plaisir ? A aimer la vie et les êtres de tout son coeur, à marcher plus vite que son ombre, à courir la campagne pour sauver les animaux en détresse. A chanter divinement bien. Tout cela n'est plus, tout n'est que souvenir, elle existe sans vivre.
Ce soir il me fallait évacuer ces douloureux ressentis, pour pouvoir avancer et puiser un peu de courage pour demain, pour la longue distance à parcourir, pour les peurs qui ne manqueront pas de m'assaillir. Ils ont pourtant tellement besoin de me retrouver, comme une petite lueur dans leur nuit sans fin.
Maman, je te parlerai de fleurs odorantes, d'insectes gourmands, de superbe coucher de Lune et on chantera les chansons que tu aimes.